<122>en Poméranie, tout le pays fut délivré d'ennemis. Les Danois, obligés d'abandonner Rostock, remirent cette ville aux troupes du Roi comme directeur du cercle de la Basse-Saxe : mais les Suédois en délogèrent les Prussiens. La neutralité du Roi n'en souffrit aucune atteinte; et il continua de négocier, afin de porter les esprits à quelque conciliation, et pour conjurer les orages qui s'assemblaient autour de ses États.

Au commencement de 1713, Frédéric Ier mourut d'une maladie lente qui avait depuis longtemps miné ses jours; il ne vit point la consommation de la paix, ni le rétablissement du repos dans son voisinage.

Il eut trois femmes : la première fut une princesse de Hesse, dont il eut une fille, mariée au prince héréditaire de Hesse à présent roi de Suède27 Sophie-Charlotte de Hanovre mit au monde Frédéric-Guillaume, qui lui succéda; et il répudia la troisième, qui était une princesse de Mecklenbourg, à cause de sa démence.

Nous venons de voir tous les événements de la vie de Frédéric Ier; il ne nous reste qu'à jeter rapidement quelques regards sur sa personne et sur son caractère. Il était petit et contrefait; avec un air de fierté, il avait une physionomie commune. Son âme était comme les miroirs, qui réfléchissent tous les objets qui se présentent; flexible à toutes les impressions qu'on lui donnait, ceux qui avaient gagné un certain ascendant sur lui, savaient animer ou calmer son esprit, emporté par caprice, doux par nonchalance. Il confondait les choses vaines avec la véritable grandeur, plus attaché à l'éclat qui éblouit, qu'à l'utile qui n'est que solide : il sacrifia trente mille hommes de ses sujets dans les différentes guerres de l'Empereur et des alliés, afin de se procurer la royauté; et il ne désirait cette dignité avec tant d'empressement, quafin de contenter son goût pour le cérémonial, et de justifier par des prétextes spécieux ses fastueuses dissipations. Il était magnifique et généreux; mais à quel prix n'acheta-t-il pas le plaisir de contenter ses passions? il trafiquait du sang de ses peuples avec les Anglais et les Hollandais, comme ces Tartares vagabonds qui vendent leurs troupeaux aux bouchers de la Podolie pour les égorger. Lorsqu'il vint en Hollande pour recueillir la succession


27 L'an 1751.