<82> M. de Zieten qu'il s'agissait de quelque engagement sérieux à la gauche du Roi : il ne voulut point se hasarder à quitter l'armée dans un moment où peut-être sa présence deviendrait nécessaire; il différa son départ jusqu'à midi : mais le moment favorable était passé; il ne put avancer que jusqu'à Hartha, où il se campa, parce que Loudon venait de garnir toutes les gorges qui mènent à Landeshut, et que M. de Lacy avait pris avec vingt mille hommes la position de Ruhbank. M. de Nauendorf, dont le corps était demeuré campé à Zirlau, proche de Freybourg, se répandait pendant ce temps-là dans la plaine, et poussait ses partis jusqu'à Jauer et Liegnitz. Le Roi envoya M. de Krockow à Wahlstatt, qui surprit un détachement de Nauendorf fort de plus de trois cents hommes, qu'il ramena tous prisonniers à l'armée.

Toutefois le maréchal Daun n'était pas aussi tranquille qu'il le paraissait; il préparait des chemins de Landeshut à Bolkenhayn; il faisait filer des troupes à Ruhbank, et, en combinant tous ces préparatifs, il était facile d'en conclure qu'il couvait le dessein de surprendre par une marche détournée l'armée du Roi, et de la prendre à dos par le chemin de Bolkenhayn qu'on réparait. On pouvait éviter ce hasard; il aurait été téméraire de s'y exposer; d'ailleurs, les Prussiens valent mieux pour l'offensive que pour la défensive; de plus, les fourrages des environs étaient consommés; de sorte qu'au lieu de s'exposer à l'incertitude d'un pareil événement, le Roi fit le projet de tourner avec sa gauche la droite du maréchal Daun, à contre-sens du mouvement qu'il avait exécuté avec sa droite contre M. Loudon.

Dès le soir du 16, l'armée quitta le camp de Reichenau et de Baumgarten. La première tentative devait se faire sur la hauteur de Kunzendorf; mais l'ennemi, qui pouvait s'y rendre plus vite, prévint les Prussiens; de plus, comme il fallait traverser le village de Zirlau, le prince de Löwenstein, qui campait près de là, engagea d'abord l'escarmouche, qui bientôt fut suivie d'une vive canonnade. La direction que l'armée du Roi prenait, était à trois mille pas du pied des mon-