<2>culière. Le public s'était accoutumé à éluder les lois. Les procureurs faisaient un trafic honteux de la bonne foi; il suffisait d'être riche pour gagner sa cause, et d'être pauvre pour la perdre. Ces abus, devenant de jour en jour plus intolérables, demandaient nécessairement une réforme, tant pour les personnes des juges, des avocats et des procureurs, que pour les lois mêmes, qu'il fallait éclaircir, et dont surtout il fallait retrancher ces espèces de formalités, qui, ne touchant point au fond de la cause, ne font que prolonger les procédures.

Le Roi chargea son grand chancelier de Cocceji de ce travail : c'était un homme d'un caractère intègre et droit, dont la vertu et la probité étaient dignes des beaux temps de la république romaine; savant et éclairé, et qui, comme Tribonien, semblait être né pour la législature et pour le bonheur des hommes. Ce savant jurisconsulte entreprit avec tant de zèle cet ouvrage pénible et délicat, qu'après un an d'un travail laborieux les cours souveraines de justice, purgées de tous les sujets qui en avaient fait la honte, furent remplies par des magistrats vertueux. Le nouveau code des lois, universel pour toutes les provinces de la domination prussienne, fut achevé; et après qu'il eut été approuvé par les états, ces lois furent promulguées.a On étendit ses vues jusque sur l'avenir; et comme l'expérience des choses humaines apprend que les meilleures institutions se corrompent, ou deviennent inutiles, si l'on en détourne les yeux, et qu'on ne ramène pas ceux qui doivent les observer aux premiers principes qui en ont posé les fondements, on régla qu'il se ferait tous les trois ans une visitation générale des cours souveraines de justice, pour tenir la main à l'observation des nouvelles lois, et pour punir les officiers de justice qui auraient prévariqué. Cet ordre nouveau introduit dans la justice, raffermit le bonheur des citoyens, en rendant les posses-


a Le Roi paraît éviter le nom de Codex Fridericianus. Ce code fut promulgué en 1748.