<15> à se mettre sur sept ou huit lignes. Les Français ne leur laissèrent pas le temps de finir tranquillement leur disposition; la maison du Roi les attaqua, perça par quatre lignes de cavalerie, renversa tout ce qu'elle rencontra, et fit des prodiges de valeur : elle aurait peut-être remporté l'honneur de cette journée, si elle n'avait pas sans cesse trouvé de nouvelles lignes à combattre. Ces attaques réitérées l'ayant mise en désordre, le régiment de Styrum autrichien s'en aperçut, et la fit reculer à son tour. Cela n'aurait pas fait perdre la bataille aux Français : la véritable cause ne doit s'attribuer qu'au mouvement imprudent de M. de Harcourt et de M. de Grammont. Ils étaient à la droite de l'armée avec la brigade des gardes françaises; ils quittent leur poste sans ordre, et s'avisent de vouloir prendre en flanc la gauche des alliés, qui tirait vers le Main : par cette manœuvre ils empêchèrent leurs batteries, qui étaient au delà du Main, et qui incommodaient beaucoup les alliés, de tirer. Les gardes françaises ne soutinrent pas la première décharge des Autrichiens : elles prirent la fuite d'une manière honteuse, et se précipitèrent dans le Main, où elles se noyèrent; d'autres portèrent le découragement et l'épouvante dans le reste de l'armée. Le prince Louis de Brunswic, qui servait dans les troupes autrichiennes, eut toutes les peines à persuader au roi d'Angleterre de faire avancer les Anglais; ce furent cependant eux qui décidèrent les Français à la retraite et à repasser le Main.

Les Français plaisantèrent de leur retraite. On appela cette action la journée des bâtons rompus, parce que M. de Harcourt et M. de Grammont n'avaient attaqué que dans l'espérance d'obtenir le bâton de maréchal comme une récompense due à leur valeur; on donna aux gardes françaises le sobriquet de canards du Main; on pendit une épée à l'hôtel de Noailles avec l'inscription : Point homicide ne seras. Sans doute que ce maréchal ne devait pas se tenir auprès de sa batterie au delà du Main : s'il avait été auprès de l'armée, il n'aurait jamais permis aux gardes françaises d'attaquer si mal à propos; et si les