<67>prendre une ville auprès de laquelle il campe, ou que vous le voulez rejeter dans un pays stérile où il ne subsistera qu'avec peine, ou que vous espérez d'engager une affaire qui vous procure de plus grands avantages encore. Si vous avez une raison pareille, il faut travailler au projet de l'exécution; mais, en le faisant, il faut aussi examiner bien soigneusement si les marches que vous allez faire et les camps que vous allez prendre ne pourraient pas vous rejeter avec l'armée dans de plus grands embarras, comme sont ceux de vous éloigner d'une mauvaise ville où vous avez vos vivres, et que les troupes légères pourraient prendre d'emblée en votre absence, ou de vous mettre dans une position où l'ennemi, de son côté, pourrait, par un mouvement, vous couper de votre pays et de vos derrières, ou bien si le pays vers lequel vous voulez tirer ne manquerait pas de fourrages, et vous obligerait peut-être de l'abandonner bientôt. En examinant ces choses, on juge en même temps sur la possibilité des choses que l'ennemi peut entreprendre et sur celles qu'il n'a pas le moyen de tenter, et ensuite on lait son projet ou pour se camper sur le flanc de l'ennemi, ou pour tirer vers une province d'où il tire ses vivres, ou pour le couper de sa capitale, ou pour menacer ses magasins, ou pour prendre des positions qui lui rétrécissent ses fourrages. Pour en donner un exemple connu de tous mes officiers, je formerai le dessein que nous aurions pu arranger pour obliger le prince de Lorraine de nous abandonner Königingrätz et Pardubitz, en 1745. Du camp de Divetz,a nous aurions dû marcher par la gauche, côtoyer le comté de Glatz, et tirer vers Hohenmauth. Comme le magasin des Autrichiens était à Teutsch-Brod, et qu'ils tiraient la plupart de leurs vivres de Moravie, l'armée autrichienne aurait été obligée de marcher vers Landskron; Königingrätz et Pardubitz seraient tombés sous notre pouvoir, et les Saxons, qui par cette marche auraient été coupés de leur pays, se seraient séparés certainement


a Voyez t. III, p. 133 et 134.