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92. A LA MARGRAVE DE BAIREUTH.

Rheinsberg, 7 août 1740.1_101-a



Ma très-chère sœur,

Je vous rends mille grâces de la lettre que vous me faites le plaisir de m'écrire. J'espère que votre santé se conservera toujours bonne, et je vous supplie de vous épargner la duplicité de vos lettres. Écrivez-moi en frère, ma très-chère sœur; ce nom m'est plus cher que tous les titres quelconques, et je vous assure que je serai toujours attentif à remplir les qualités d'un bon et fidèle frère. J ai autant d'impatience de vous revoir qu'en peut avoir un amant du retour de sa maîtresse; mais j'attends que l'occasion et que le temps et la température de l'air me favorisent, car je sais que le froid et l'arrière-saison sont très-contraires à votre santé. Je partirai dans une huitaine de jours pour le pays de Clèves, et peut-être que de là je ferai encore un petit tour. Le duc de Brunswic est ici; il m'a amené son frère, auquel il lève un régiment à mon service.

Pourrais-je vous demander si, sans incommoder le Margrave, il voudrait me faire le plaisir de me lever quelques centaines d'hommes pour l'augmentation de mes troupes, que je lui payerais à raison de dix écus par tête, et les gages courants depuis le jour de leur enrôlement? Mandez-moi, je vous prie, naturellement si c'est une chose faisable ou non, car je suis fort embarrassé de trouver tout le monde qu'il me faut, et le Margrave pourrait me faire un grand plaisir par là. Adieu, ma chère et charmante sœur; ne m'oubliez jamais, et<102> soyez persuadée que je suis avec toute la tendresse possible, ma très-chère sœur, etc.

Bien mes compliments, s'il vous plaît, au Margrave.


1_101-a Cette date a été mise par un secrétaire. La lettre est du reste en entier de la main de Frédéric, comme toutes celles que nous avons données jusqu'ici.