<XVI> la margrave Philippe de Schwedta et le prince Albert de Culmbach.b qui jouissaient de son estime. En racontant même la tentative d'évasion de son frère, en 1730, et en faisant connaître combien son père fut dur envers elle à celle occasion, elle n'hésite pas à dire : « Il m'accusait d'être complice de l'entreprise du Prince royal, qu'il traitait de crime de lèse-majesté, et d'avoir une intrigue amoureuse avec Katte, duquel, disait-il, j'avais eu plusieurs enfants. Ma gouvernante, ne pouvant plus se modérer à ces insultes, eut le courage de lui répondre : Cela n'est pas vrai, et quiconque a dit pareille chose à Votre Majesté en a menti. Le Roi ne lui répliqua rien et recommença ses invectives. »c La Margrave va jusqu'à dénigrer sans ménagement, le caractère de sa mère,d qu'elle prétend néanmoins aimer jusqu'à l'adoration;e enfin, elle se permet de rapporter tout au long l'impertinent portrait que M. de Superville, envoyé chez elle par Frédéric, avait eu la hardiesse de lui tracer de ce prince.f Cependant le tout est si bien arrangé et si spirituellement raconté, que les Mémoires offrent tout l'intérêt d'un roman, avec lequel ils ont du reste plus d'un rapport. Mais la prétendue véracité de la Margrave et l'impartialité historique qu'elle affecte ne méritent pas plus de confiance que ses protestations d'attachement à ses proches; car elle défigure souvent les faits de telle sorte, qu'il n'est pas possible de croire à une erreur involontaire de sa part. Ainsi, par exemple, elle dit, t. Il, p. 297, en parlant de l'avènement de Frédéric : « Je lui écrivais toutes les postes, et toujours avec effusion de cœur. Six semaines se passèrent sans que je reçusse de réponse. La première qui me parvint au bout de ce temps-là n'était que signée du Roi et fort froide. » Nous nous contentons d'engager le lecteur à comparer ce passage avec nos nos 80, 83, 84, 85, 86, 87, 88, écrits du 1er juin au 14 juillet 1740;


a Mémoires, 1. I, p. 178 et 179; t. II, p. 3 et 104.

b L. c., t. II, p. 54, 55, 111, 121, 188 et 189.

c L. c., t. I, p. 242 et 243.

d L. c., t. 1, p. 12, 13, 30, 31, 58-60, 76, 77, 87 et suivantes, 108-110, 128, 129, 131, 132, 154, 157, 161, 251, 303, 304, 305, 306, 309 et suivantes, 320, 321 et suivantes, 333 et suivantes; t. II, p. 4, 5, 6, 77 et suivantes, 94, 116 et suivantes; voyez, enfin, la traduction des Mémoires (t. I), p. 356, 358 et 359, passages qui ne se trouvent pas dans l'édition de Brunswic.

e Mémoires, t. I, p. 284 et 303; t. II, p. 299 et 300.

f L. c., t. II, p. 273. 276 et 277; ci-dessous, p. 64, 71 et 73.