<439> tout événement, et recevoir ce que le destin voudra nous départir avec un visage égal, sans orgueil des bons succès, et sans que les mauvais nous avilissent.

Adieu, ma chère sœur. Voilà une épître bien remplie de morale. Si mes dictons vous ennuient, vous n'avez qu'à ne pas lire mes lettres. Soyez toutefois persuadée de l'amitié tendre avec laquelle je suis à jamais, etc.

7. A LA PRINCESSE AMÉLIE ET A LA DUCHESSE CHARLOTTE DE BRUNSWIC.

(Camp de Prague) ce 11 (mai 1757).



Mes chères sœurs,

J'ai reçu vos lettres dans la plus violente crise, ce qui m'a empêché de vous répondre plus tôt. Je vous écris à toutes les deux, n'ayant pas le temps de faire plus d'une lettre. Nous avons à présent ébauché ici l'ouvrage; il faudra encore quelques petits coups de cognée pour l'achever. Mon frère Henri a fait des merveilles, et s'est distingué au delà de ce que je puis en dire; mes deux autres frères n'ont pas du tout été dans la bataille; ils se sont trouvés dans l'armée du maréchal Keith. Nous avons perdu le digne maréchal Schwerin et bien des braves officiers. J'ai perdu des amis que je regretterai toute ma vie; enfin, mes chères sœurs, si le bonheur nous favorise à présent, nous aurons gain de cause. Toute la généralité, et, selon le dire des déserteurs, soixante mille hommes sont enfermés à Prague; j'entreprends de les réduire à se rendre prisonniers de guerre. C'est une terrible entreprise; il faut du bonheur pour y réussir. Ma chère