<365>Que votre stoïcisme, mon cher Voltaire, aille au moins à vous procurer une tranquillité inaltérable. Dites avec Horace : In virtute mea involvo.a Ah! s'il se pouvait, je vous recueillerais chez moi; ma maison vous serait un asile contre tous les coups de la fortune, et je m'appliquerais à faire le bonheur d'un homme dont les ouvrages ont répandu tant d'agréments sur ma vie.

J'ai reçu les deux nouveaux actes de Zopire. Je ne les ai lus qu'une fois; mais je vous réponds de leur succès. J'ai pensé verser des larmes en les lisant; la scène de Zopire et de Séide, celle de Séide et de Palmire, lorsque Séide s'apprête à commettre le parricide, et la scène où Mahomet, parlant à Omar, feint de condamner l'action de Séide, sont des endroits excellents. Il m'a paru, à la vérité, que Zopire venait se confesser exprès sur le théâtre pour mourir en règle, que le fond du théâtre ouvert et fermé sentait un peu la machine; mais je ne saurais en juger qu'à la seconde lecture. Les caractères, les expressions des mœurs, et l'art d'émouvoir les passions, y font connaître la main du grand, de l'excellent maître qui a fait cette pièce; et, quand même Zopire ne viendrait pas assez naturellement sur le théâtre, je croirais que ce serait une tache qu'on pourrait passer sur le corps d'une beauté parfaite, et qui ne serait remarquée que par des vieillards qui examinent avec des lunettes ce qui ne doit être vu qu'avec saisissement et senti qu'avec transport.

Vos fêtes de Paris n'ont satisfait que votre vue; pour moi, je serais pour les fêtes dont l'esprit et tous nos sens peuvent profiter. Il me semble qu'il y a de la pédanterie en savoir et en plaisir; que de choisir une matière pour nous instruire, un goût pour nous divertir, c'est vouloir rétrécir la capacité que le Créateur a donnée à l'esprit humain, qui peut contenir plus d'une connaissance, et c'est


a

Odes

, liv. III, ode 29, v. 54 et 55 :

..........Mea
Virtute me involvo.

Odes

, acte XX, scène XXX.