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24. AU MÊME.

Breslau, 2 janvier 1759.

J'ai vu, mon cher mylord, par la lettre que vous avez écrite à Eichel,308-a ce que vous désirez de moi touchant vos affaires. Je me fais un plaisir de pouvoir vous être utile. Je parlerai dès demain à M. Mitchell308-b de ce que vous souhaitez. Je ne traiterai point mon intercession avec froideur, mais avec tout le zèle de l'amitié; je négocierai chaudement, et, s'il y a moyen de vous contenter, je l'obtiendrai. Je vous prie néanmoins de penser que la réussite de l'affaire ne dépend pas de moi, que les ministres et les gens en place sont pour l'ordinaire durs; et, accoutumés comme ils le sont à des recommandations journalières, ils n'en font pas grand cas. Mais de quoi je puis vous assurer, et sur quoi vous pouvez compter, c'est que je ne vous manquerai pas, et que, n'eussé-je qu'une chemise, je la partagerais avec vous.

Je crois que j'ai deviné l'article que vous avez barré dans votre lettre. On dit le roi d'Espagne malade de corps et d'esprit, prêt à abdiquer et prêt à descendre au tombeau. Vous jugez dans quelle situation cette crise jette les personnes attachées au gouvernement. On parle de Don Carlos; on croit qu'il veut avoir l'Espagne et garder le royaume de Naples. Il a raison, mais d'autres ne l'entendent pas ainsi; ceux qui veulent percer dans l'avenir croient que tout ce brouillamini pourrait mener à une guerre en Italie, au moins brouiller ces deux chers amis qui se tendent la main pour m'assassiner très-chrétiennement et très-apostoliquement. Mais ce n'est pas de quoi je m'embarrasse; je n'ai que mon épée et ma juste cause pour moi, et je me persuade que ce hasard qui fait éclore des événements si<309> extraordinaires en amènera peut-être quelqu'un d'heureux; et, si cela n'arrive pas, il faut également prendre son parti. Adieu, mon cher mylord; je vous embrasse de tout mon cœur.


308-a Conseiller intime de Cabinet.

308-b Envoyé de la Grande-Bretagne à la cour de Frédéric. Voyez t. XII, p. 224.