<188>Loin de nous donner du mérite,
Le flatteur le fait éclipser;
L'humilité seule est l'élite
Des vertus qu'on doit estimer.
Quand même l'humaine injustice
Nous confondrait avec le vice,
Rien ne saurait nous avilir.
La vertu n'est point l'accessoire
De la louange et de la gloire;
C'est un bien qu'on ne peut ravir.

Louis, devant qui tremblait la terre,
Ce roi, dont tout craignait le bras,
Louis était grand dans la guerre,
Mais très-petit aux opéras.a
Vous noyez, courtisans iniques,
Des rois les vertus héroïques,
Vous rendez leurs noms odieux;
Je ne vois plus dans Alexandre
Le triomphateur du Scamandre
Lorsqu'il se dit le fils des dieux.

Réveillez-vous de votre ivresse,
Rois, princes, savants et guerriers;
Arrachez-vous de la mollesse
Qui flétrit vos plus beaux lauriers,
De cet océan du mensonge
Où votre amour-propre vous plonge;
Et, détestant la vanité,
D'un bras vengeur brisez la glace
Qui, déguisant votre grimace,
Vous a trahi la vérité.

O Vérité chaste et sincère!
O fille immortelle des dieux!
Vérité toujours salutaire
Habitez ces terrestres lieux.


a Voyez t. III, p. 192, et t. VIII, p. 162 et 313.