<277>Socrate.

Cette engeance n'existait pas de mon temps; mais des morts m'ont appris que ce sont des sophistes armés de poignards et munis de poisons. Monsieur le comte de Struensée ne serait-il pas de leur secte?

Struensée.

Je suis de celle de Cromwell, de César Borgia et de Catilina. Mais continuez, monsieur le duc, à m'instruire.

Choiseul.

Après un aussi beau coup, je m'emparai d'Avignon, j'en chassai le pape, afin d'annexer pour jamais le Comtat au royaume de France; j'y ajoutai encore la Corse, que j'escamotai adroitement aux Génois.

Socrate.

Tu étais donc un conquérant?

Choiseul.

Ce fut de mon cabinet que je fis ces conquêtes; et nageant dans les plaisirs, livré aux dissipations, du sein des voluptés je troublais l'Europe. Plus les autres puissances étaient agitées, plus la France pouvait se maintenir en paix. Les guerres et la mauvaise administration précédente avaient épuisé nos finances, le crédit était perdu, et la banqueroute presque certaine.

Struensée.

De quelle façon troublâtes-vous l'Europe?

Choiseul.

Jamais rien de plus fin, de plus adroit, de plus sublime ne s'est imaginé. Premièrement je plaçai de grands fonds dans la compagnie