<14>Nous tenons tout des cieux propices,
Ils nous prodiguent leurs faveurs.
Le luxe, enfant de l'opulence,
Les biens et la magnificence
Furent créés pour nos plaisirs;
La belle dont le teint éclate,
Le vin dont la douceur me flatte,
Sont faits pour combler mes désirs.

Quand même mon âme immortelle
Subirait le sort de son corps,
Et que, n'étant point éternelle,
Elle descendrait chez les morts,
O Dieu! ta clémence infinie
Dans aucun sens ne se dénie,
Je sens tes consolations.
Est-ce un malheur de ne point être?
Tel qui n'est plus ne peut connaître
Les pleurs et les afflictions.

Mais si mon âme, en sa durée,
D'Atropos trompe le ciseau,
Et que sa substance épurée
Survive à l'horreur du tombeau,
Que le futur est plein de charmes!
Je vois des plaisirs sans alarmes;
Dieu, dont je ressens les bontés,
Soulageant ici ma misère,
Me paraît tel qu'un tendre père;
Il fera nos félicités.