<253>Pour amuser un roi d'ennuis toujours muni,
Que sur un vaudeville un des chantres lyriques
Lui détonne au Pont-neuf le calcul infini.
S'il vous faut captiver le cœur d'une maîtresse,
Ne lui dépeignez point la peine qui vous presse;
Sans vanter son esprit, ses charmes, ses appas,
A toiser tous ses traits employez le compas,
De leur proportion comparez la mesure,
Et puis laissez errer la vague conjecture;
Vous ferez un ouvrage et physique et profond,
En vers comme en faisaient Musschenbroek et Newton.
Dans des cerveaux brûlés jadis la Fable éclose
Enfanta les vains dieux de la métamorphose,
Improprement donna le nom de Jupiter
A l'espace infini qu'on appelle l'éther,
Par Vénus désigna la féconde nature,
Bacchus était le vin, Cérès l'agriculture.
Nouvel iconoclaste, armez-vous de rigueur,
Extirpez tous ces dieux, fantômes de l'erreur,
Rejetez le sens clair de leur allégorie;
La vérité voilée est à demi flétrie.
Au lieu de nous conter comment le dieu des eaux
Protégea contre Pan Syrinx dans les roseaux,
Philosophe solide, il faudra vous rabattre
A prouver en rimant que deux fois deux font quatre.
O l'excellent secret de plaire et de charmer!
Flairez, flairez l'encens qui va vous enfumer.
Aux hautes régions le voyez-vous paraître,
Au sourcil refrogné, ce sombre géomètre,
Applaudir en bâillant à ce genre nouveau,
Digne de son aride et stérile cerveau,