<272>La trompette guerrière éclate dans les airs,
On n'attend pour agir que la fin des hivers
La saison des plaisirs, où le dieu de Cythère
Fait respirer l'amour à la nature entière,
Où les mortels en paix se livrent à ses feux,
N'offre que des dangers aux cœurs audacieux :
Mais la gloire a caché ces périls à leur vue
Dès que l'air s'adoucit, que la neige fondue
Tombe en flots argentés de la cime des monts,
Et serpente en ruisseaux à travers les vallons,
Que les prés, émaillés par des fleurs différentes,
Présentent aux troupeaux leurs pâtures naissantes,
Que les blés verdoyants embellissent nos champs,
Dès que Flore aux humains annonce le printemps,
Ces guerriers, préparés contre des coups sinistres,
Des vengeances des rois redoutables ministres,
Volent pour s'assembler dans les champs de l'honneur,
Et tous, pleins du désir de marquer leur valeur,
Quittent l'abri du toit pour la toile légère.
Leurs voisins effrayés appréhendent la guerre,
Et de leurs laboureurs ces champsa abandonnés
Par des bras étrangers vont être moissonnés.
Vers un lieu désigné cette troupe guerrière
S'assemble pour camper sur un front de bandière
Sitôt qu'on a choisi les lieux des campements,
On voit tracer, bâtir et croître en peu de temps
Places, maisons, palais de cette ville immense;
L'élite de l'État y tient sa résidence,
Le travail y préside, il élève ces toits
Sans l'aide du ciment, des pierres ni du bois;


a Les champs. (Variante de l'édition in-4 de 1760, p. 369.)