<213>Ce n'est point sentiment, dans le fond c'est bêtise;
Le scélérat Damon craint d'être confondu,
Ses vices sont couverts du lard de la vertu,
Si vous sondez son cœur, ce n'est qu'hypocrisie.
Plein d'un meilleur esprit, l'âme du vrai saisie,
Varus combat le charme et l'abus des plaisirs,
Réprime l'intérêt, étouffe ses désirs,
Rabaisse son orgueil, lutte contre lui-même,
Et sert le genre humain, qu'il déplore et qu'il aime.
Telles sont les vertus d'un digne citoyen,
Tel doit être tout sage et tout homme de bien.
Ce caractère heureux, cette vertu si rare,
C'est le plus beau présent dont la nature avare
Ait honoré jamais la faible humanité.
Oui, mortel généreux, exemple de bonté,
Oui, mon âme attendrie, admirant ta sagesse,
Pardonne, en ta faveur, aux vices de l'espèce.
Tandis que tant d'humains sont faibles, chancelants,
Pareils à ces roseaux agités par les vents,
Mon héros, tel qu'un chêne affermi dans la terre,
Résiste à la tempête et brave le tonnerre;
Le crime essaye en vain de souiller son honneur,
Et l'envie impuissante en frémit de fureur;
Il est comme un vaisseau qui triomphe d'Éole,
Ses voiles sont l'esprit, la gloire est sa boussole,
Son jugement le sert comme un pilote heureux,
Les ouragans qu'il craint sont ses désirs fougueux,
Le rivage charmant où tend son espérance,
C'est un port peu connu, la bonne conscience;
Dans ce port fortuné, terme de ses succès,
Il jouit constamment d'une éternelle paix.