<153>Faisons de leurs palais une seconde Troie.a
Tous leurs fiers défenseurs, dans leurs sanglants combats,
Ont été moissonnés par la faux du trépas,
Le plus pur de leur sang acheta leur victoire;
Tombeaux de leurs héros, vous l'êtes de leur gloire,
Le succès nous appelle, il est temps, vengeons-nous. »
A ces mots nos guerriers, pleins d'un noble courroux,
S'élancent aux combats; les cieux leur sont propices,
Les forêts, les torrents, les monts, les précipices
Que la Saxe étonnée enferme dans son sein,
Rien ne peut s'opposer à leur heureux destin.
Sur ses remparts affreux l'ennemi se rassure,
Il faut vaincre à la fois et l'art et la nature;
Ils volent sur des monts tout chargés de frimas,
Que défendait le feu, le fer et le trépas;
Ils volent, rendez-vous, cédez à leur courage,
Cédez, faibles efforts d'une impuissante rage.
La mort fond sur Bredowb par des coups imprévus;
O mort cruelle! arrête, épargne ses vertus.
Des ennemis altiers l'espérance est détruite,
Vers Dresde consternée ils prennent tous la fuite.
Ah! Polentz, Kleist, Rintorf,b quels coups vous ont percés!
Vous nous rendez vainqueurs, grand Dieu! vous périssez!
Quel barbare a sur vous porté sa main sanglante?


a

Qu'ils cherchent dans l'Épire une seconde Troie.

Racine,

Andromaque

, acte I, sc. II.

b Le général Asmus-Ehrentreich de Bredow, le même à qui l'Épître X est adressée, fut blessé à la bataille de Kesselsdorf.
     Le général-major Samuel de Polentz, le colonel de Rintorf (nommé, le 18 décembre 1745, commandeur du régiment d'infanterie d'Alt-Würtemberg, no 46) et le major Joachim-Erdmann de Kleist moururent des suites des blessures qu'ils avaient reçues à la bataille de Kesselsdorf. Voyez t. III, p. 187 et 188.