<137> trop outrées pour qu'on pût parvenir à s'accorder. Si les hommes étaient capables de raison, feraient-ils des guerres si longues, si acharnées et si onéreuses, pour en revenir tôt ou tard à des conditions de paix qui ne leur paraissent intolérables que dans les moments où la passion les gouverne, ou dans lesquels la fortune les favorise?

Les alliés ouvrirent la campagne par la prise de Tournai et la bataille de Malplaquet, où le Prince royal se trouva en personne. Le comte de Fincka eut beaucoup de part à cette victoire; il fut le premier qui força le retranchement français avec les Prussiens; il forma ses troupes sur le parapet, et de là il soutint la cavalerie impériale, que les Français repoussèrent par deux reprises, jusqu'à ce qu'un plus grand nombre de troupes se joignant aux siennes, vinrent mettre le dernier sceau à cette victoire.

En Poméranie, les Suédois faisaient appréhender par leurs démonstrations qu'ils n'eussent dessein de pénétrer en Saxe. Le Roi craignit que la guerre ne se portât enfin dans ses propres États; et, dans l'intention d'assoupir les troubles du Nord, il prit toutes les mesures qui pouvaient les augmenter. Il proposa l'entretien d'une armée de neutralité; mais cette armée ne s'assembla jamais. Krassow consentit à une suspension d'armes; Charles XII, qui l'apprit, protesta, du fond de la Bessarabie, contre toute neutralité : ce traité ébauché fut rompu, et il eut le sort de tous ces actes publics que la nécessité et l'impuissance font faire dans un temps, et que la force, secondée de conjonctures favorables, rompt dans un autre.

Du côté du Sud, la France renoua les négociations de la paix à Gertruydenberg; et, dès les premières conférences, elle s'engagea à reconnaître la royauté de Prusse et la souveraineté de Neufchâtel. L'ouvrage de la paix avorta encore; et les Prussiens furent employés dans cette campagne, sous le prince d'Anhalt, aux siéges d'Aire et de Douai, qu'ils prirent. Le Roi déclara alors qu'il ne rendrait pas la ville


a Albert-Conrad, comte Finck de Finckenstein, alors lieutenant-général.