4218. AU CONSEILLER BARON LE CHAMBRIER A PARIS.

Potsdam, 31 mars 1750.

J'ai bien reçu votre dépêche du 20 de ce mois. Puisque la proposition que vous avez faite par mon ordre au marquis de Puyzieulx, pour que quelque ministre de France à une cour étrangère soit chargé de faire ministérialement à un ministre de Russie qui y réside une déclaration dans le même sens que je la fais faire à Pétersbourg,317-2 n'a pas été goûtée, vous n'en parlerez plus et laisserez tomber cette affaire.

Quant aux nouvelles de Vienne et de Londres, je me réfère à ce que mes ministres du département des affaires [étrangères] vous en marqueront; j'ajoute seulement que mes dernières lettres de Londres<318> m'ont appris que les ministres anglais avaient insinué à l'ambassadeur de France qu'il pourrait se dispenser du voyage d'Hanovre, sous prétexte de l'étiquette, mais qu'on savait d'ailleurs que le roi d'Angleterre n'avait pas envie qu'il y soit; qu'en attendant l'Ambassadeur en avait écrit à sa cour, pour avoir des ordres là-dessus. Quoique je ne me mêle point de ce qui regarde les affaires de la France qui lui sont propres, néanmoins je regarderais comme un des services les plus essentiels que vous sauriez me rendre, si vous pouvez vous prendre adroitement pour insinuer au marquis de Puyzieulx de quelle nécessité il serait que l'ambassadeur de France ne quittât point le roi d'Angleterre pendant le séjour qu'il ferait à Hanovre, dans un temps de crise tel que celui-ci. Vous conviendrez vous-même que j'ai bien des raisons pour souhaiter qu'un ministre de France fût du voyage d'Hanovre, puisqu'il n'est que trop connu que c'est toujours là où les projets les plus pernicieux sont mis sur le tapis et où l'on forme le plus de cabales et d'intrigues;318-1 et quoique mon ministre à Londres sera du voyage d'Hanovre, néanmoins, seul et isolé qu'il y serait, il s'en faudra beaucoup qu'il sache rendre là d'aussi bonnes services que s'il était appuyé par un ministre de France; pour ne pas dire qu'il courrait les mêmes risques qu'il a fait autrefois, savoir qu'on lui imputerait qu'il avait outré ses rapports et mandé de fausses nouvelles, ce qui ne saurait pas se faire, si tout se passât sous les yeux de l'ambassadeur de France.

Je vous [dis] tout ceci pour votre direction et me remets, au reste, sur votre dextérité pour faire vos insinuations là-dessus de la manière la plus convenable.

Au reste, mes nouvelles de Russie sont que la cour de Pétersbourg voudra s'expliquer à la réponse de la Suède donnée au sieur Panin, que cependant il n'était que trop certain que le chancelier Bestushew redoublerait ses agaceries et chicanes contre la Suède au point qu'il la mettrait au pied du mur pour l'engager, s'il y avait moyen, à commencer, elle, la première le branle &#;: enfin, que le ministère de Suède aurait besoin de toute la fermeté et de toute la modération possible, pour éviter que, par les indignités du chancelier Bestushew, les choses ne soient portées à quelque extrémité.

Federic.

Nach dem Concept



317-2 Vergl. S. 273. 277.

318-1 Vergl. Bd. VI, 562.