<193>France, qui écrit sur tout cela de si belles choses, et qui en fait si peu, sera, je crois, la dernière à faire justice, car il y a encore trop de prêtres à Versailles; mais elle la fera pourtant enfin, ne fût-ce que par la honte de rester toute seule à ne pas faire ce qui est raisonnable. Cette engeance sacerdotale, dont V M, fait tout le cas qu'elle mérite, et qui, à la honte de la France, y conserve encore tant de crédit, a quelquefois de plaisantes aventures. On me contait ces jours derniers qu'un évêque fanatique voulait, il y a huit à dix ans, refuser ce que nous appelons le bon Dieu à un pauvre diable de janséniste fanatique qui se mourait; comme l'évêque appréhendait que le curé de la paroisse, malgré sa défense, ne communiât le janséniste, il envoya un de ses grands vicaires consommer (c'est-à-dire manger) toutes les hosties qui étaient dans le tabernacle, afin qu'il n'en restât pas une pour le pauvre malade. Le grand vicaire obéit, et n'en laissa pas une; mais comme le ciboire en était tout plein, le bon prêtre en eut une effroyable indigestion. Il envoya chercher le médecin, qui lui annonça un très-grand danger, auquel il n'y avait de ressource que l'émétique. Le grand vicaire s'y refusa constamment, disant qu'il ne voulait point vomir, au grand étonnement du médecin, qui ne pouvait comprendre la raison que lui en donnait le prêtre, que sa conscience ne le lui permettait pas. Enfin, le prêtre en mourut, martyr de sa sainte voracité. Voilà, Sire, un bon conte à mettre en vers. V. M. devrait bien le rimer, et le dédier à son ami Cristophe ou Christophe de Beaumont. L'orateur dont j'ai eu l'honneur de vous envoyer l'oraison funèbre ne se soucie point du tout que V. M. le confonde avec ce digne et savant prélat. Cet orateur s'appelle Boismont, et non pas Beaumont, et n'a de prêtre que ce qu'il en faut pour être apte et idoine à posséder des bénéfices.
L'Empereur devait arriver le 28, non à Paris, mais à Versailles; si j'avais l'honneur de le rencontrer, ce qui ne sera pas, car je ne vais pas plus à Versailles qu'à Bruxelles, je prendrais la liberté de lui recommander, au nom de V. M., le coffre-fort sacerdotal et monacal, et je me flatte que V. M. ne m'en désavouerait pas. Le beau sermon qu'elle fait faire à Calvin, dans la dernière lettre dont elle m'a honoré, vaut mieux que toutes les dé-