<233> russes essayèrent d'attaquer l'infanterie prussienne; ils furent vivement repoussés par le régiment de Kreytzen. Pendant l'action de la veille et cette journée, c'était un spectacle affreux que de voir tous les villages voisins, auxquels les Cosaques avaient mis le feu, ce qui rassemblait dans ces environs toutes les calamités dont l'humanité peut être affligée. Cependant les canons prussiens tiraient avec succès, parce qu'il était presque impossible aux artilleurs de manquer la grosse masse en laquelle l'ennemi s'était mis; au lieu que les leurs tiraient sans le moindre effet. On reçut sur le soir quelque peu de munitions, dont les batteries firent un si bon usage, que la place devenant dès lors insoutenable pour les Russes, ils la quittèrent la nuit même, et allèrent se camper à Cammin. Le Roi les suivit; on fit encore quelques centaines de prisonniers sur leur arrière-garde, et l'on se campa devant Tamsel, proche des ennemis. La perte de cette bataille obligea M. de Romanzoff d'abandonner en hâte les environs de l'Oder et de Stargard, pour accélérer sa jonction avec M. de Fermor, qui bientôt se retira à Vietz, puis à Landsberg, où il rassembla toutes ses troupes. Le Roi le poursuivit jusqu'à Blumberg.
Pendant que l'armée prussienne était occupée contre les Russes, M. Loudon avait traversé la Lusace dans l'intention de les joindre, et il l'aurait fait, s'il n'avait trouvé le prince François de Brunswic dans son chemin; le Roi l'avait détaché à Beeskow du camp de Tamsel. Ce prince, après lui avoir enlevé différents partis, obligea l'ennemi à se replier sur Lübben. Des raisons plus fortes que celle-là empêchèrent le Roi de pousser plus loin les avantages qu'il avait eus contre les Russes; il fallait accourir en Saxe au secours de S. A. R. le prince Henri. M. de Dohna, en conséquence de ce nouvel arrangement, resta vis-à-vis des Russes, et le Roi partit, pour se joindre au prince son frère, avec le même corps qu'il avait amené dans l'Électorat. L'éclaircissement des faits demande que nous rapportions succinctement ce qui s'était passé jusqu'alors en Saxe.