<66>Où ton patron ou ton fléau
Arrêta ta concupiscence?a
Ah! cet exemple est bien plus beau
Que celui de la continence
Du grand destructeur de Numance,
Et digne d'un saint mort puceau.
Oui, par certaine Épître encoreb
J'ai mérité de l'ellébore
Pour avoir, dans tous tes portraits,
Follement barbouillé tes traits.
Je t'y traitai de Turc à More,
Sachant qu'aucun mortel n'ignore
Que les poëtes sont menteurs;
Comme on ne daigne pas nous croire,
J'ai cru, pour établir ta gloire,
Que je devais charger tes mœurs.
Enfin, Darget, sur ton histoire
Nul ne consultera mes vers;
Ils n'iront point à la mémoire,
Ils seront rongés par les vers.
Je veux que leur recueil stérile,
Enfant de mon oisiveté,
Périsse dans l'obscurité,
Loin des yeux d'un mordant Zoïle.
Tout auteur plein de vanité,
Qui tend à l'immortalité,
Doit, narrant avec pureté,
Avoir l'art de plaire ou d'instruire.
Moi, qui n'ai point ces grands talents,
a Le Palladion, chant troisième.
b Épître à Darget, t. X, p. 238-247.