<75>bien qu'aujourd'hui il ne reste plus de vestiges en France de la puissance des seigneurs et des nobles, et de ce pouvoir dont les rois prétendaient que les grands abusaient.

Le cardinal Mazarin marcha sur les traces de Richelieu; il essuya beaucoup d'oppositions, mais il y réussit; il dépouilla, de plus, le parlement de ses prérogatives, de sorte que cette compagnie n'est aujourd'hui qu'un fantôme à qui il arrive encore quelquefois de s'imaginer qu'il pourrait bien être un corps, mais qu'on fait ordinairement repentir de cette erreur.

La même politique qui porta les ministres à l'établissement d'un despotisme absolu en France leur enseigna l'adresse d'amuser la légèreté et l'inconstance de la nation pour la rendre moins dangereuse; mille occupations frivoles, la bagatelle et le plaisir donnèrent le change au génie des Français, de sorte que ces mêmes hommes qui avaient si longtemps combattu le grand César, qui secouèrent si souvent le joug sous les empereurs, qui appelèrent les étrangers à leur secours du temps des Valois, qui se liguèrent contre Henri IV, qui cabalèrent sous les minorités, ces Français, dis-je, ne sont occupés de nos jours qu'à suivre le torrent de la mode, à changer très-soigneusement de goûts, à mépriser aujourd'hui ce qu'ils ont admiré hier, à mettre l'inconstance et la légèreté en tout ce qui dépend deux, à changer de maîtresses, de lieux, d'amusements et de folie. Ceci n'est pas tout, car de puissantes armées et un très-grand nombre de forteresses assurent à jamais la possession de ce royaume à ses souverains, et ils n'ont à présent rien à redouter des guerres intestines, non plus que des entreprises de leurs voisins.