<218>un des objets les plus importants de son ministère, et qu'il ne doit, par cette raison, confier qu'à lui-même. Son intérêt semble requérir nécessairement qu'il se trouve en personne à son armée, puisque tous les ordres émanent de sa personne, et qu'alors le conseil et l'exécution se suivent avec une rapidité extrême. La présence auguste du prince met fin, d'ailleurs, à la mésintelligence des généraux, si funeste aux armées et si préjudiciable aux intérêts du maître; elle met plus d'ordre pour ce qui regarde les magasins, les munitions et les provisions de guerre, sans lesquelles un César, à la tête de cent mille combattants, ne fera jamais rien de grand ni d'héroïque; et comme c'est le prince qui fait livrer les batailles, il semble que ce serait aussi à lui d'en diriger l'exécution et de communiquer par sa présence l'esprit de valeur et d'assurance à ses troupes; c'est à lui de montrer comme la victoire est inséparable de ses desseins, et comme la fortune est enchaînée par sa prudence, et de leur donner un illustre exemple comme il faut mépriser les périls, les dangers et la mort même, lorsque c'est le devoir, l'honneur et une réputation immortelle qui le demandent.

Quelle gloire n'est point attachée à l'habileté, à la sagesse et à la valeur d'un prince, lorsqu'il garantit ses États de l'incursion des ennemis, qu'il triomphe par son courage et sa dextérité des entreprises violentes de ses adversaires, et qu'il soutient par sa fermeté, par sa prudence et par ses vertus militaires les droits qu'on veut lui contester par injustice et par usurpation!

Toutes ces raisons réunies doivent, ce me semble, obliger les princes à se charger eux-mêmes de la conduite de leurs troupes et à partager avec leurs sujets tous les périls et les dangers où ils les exposent.

Mais, dira-t-on, tout le monde n'est pas né soldat, et beaucoup de princes n'ont ni l'esprit ni l'expérience nécessaire pour commander une armée. Cela est vrai, je l'avoue; cependant cette objection ne doit pas m'embarrasser beaucoup; car il se trouve toujours des généraux entendus dans une armée, et le prince n'a qu'à suivre leurs conseils; la guerre s'en fera toujours mieux que lorsque le général est sous la tutelle du ministère, qui, n'étant point à l'armée, est hors de portée de juger des choses, et qui