<9>les talents, et le désir de lui plaire. En même temps se formait une école d'artillerie sous la direction du prince de Lichtenstein; il porta ce corps à six bataillons, et l'usage des canons à cet abus inouï auquel il est parvenu de nos jours; par zèle pour l'Impératrice il y dépensa au delà de cent mille écus de son propre bien. Enfin, pour ne rien négliger de ce qui pouvait avoir rapport au militaire, l'Impératrice fonda près de Vienne un collége où la jeune noblesse était instruite dans tous les arts qui ont rapport à la guerre; elle attira d'habiles professeurs de géométrie, de fortification, de géographie et d'histoire, qui formèrent des sujets capables; ce qui devint une pépinière d'officiers pour son armée. Par tous ces soins le militaire acquit dans ce pays un degré de perfection où il n'était jamais parvenu sous les Empereurs de la maison d'Autriche, et une femme exécuta des desseins dignes d'un grand homme.

Cette princesse, qui portait ses vues sur toutes les parties de l'administration, peu satisfaite de la manière dont les affaires étrangères et politiques s'étaient traitées, fit choix du comte Kaunitz sur la fin de l'année 1755. Elle lui donna la patente de premier ministre, pour qu'une seule tête réunît toutes les branches du gouvernement : nous aurons lieu dans son temps de faire connaître plus particulièrement cet homme, qui joua un si grand rôle; il entra dans tous les sentiments de sa souveraine; il eut l'art de flatter ses passions, et de s'attirer la confiance de l'Impératrice. Dès qu'il parvint au ministère, il travailla à former des alliances, et à isoler le roi de Prusse, pour préparer les voies à ce projet que l'Impératrice avait tant à cœur, de conquérir la Silésie, et d'abaisser le roi de Prusse; mais comme c'est proprement la matière du chapitre suivant, nous n'en dirons pas davantage sur ce sujet.

Voilà comment ces deux puissances durant la paix se préparaient à la guerre, telles que deux athlètes qui aiguisent leurs armes, et qui brûlent de l'impatience de s'en servir.