<224>grand nombre des sujets catholiques établis dans les États de sa domination.

Ce pape eut avec le roi de Portugal des démêlés plus indécents au sujet des jésuites. Ces pères avaient fait la guerre aux Espagnols et aux Portugais dans le Paraguay, et les avaient même battus. Depuis ces brouilleries, le roi de Portugal ne jugea plus convenable de confier les secrets de sa conscience et de son gouvernement à des membres d'une société qui avait agi comme ennemie de son royaume. Il renvoya le jésuite dont il s'était servi, et choisit un confesseur d'un autre ordre de religieux. Les jésuites, pour se venger de cet affront, qui tirait d'autant plus à conséquence, que la conduite du Roi pouvait être imitée par d'autres souverains, cabalèrent dans l'État, et excitèrent contre le gouvernement tous les grands du royaume sur lesquels ils avaient du crédit. Le père Malagrida, animé d'un zèle plus ardent, d'une haine théologale plus vive que ses confrères, parvint par ses intrigues à tramer une conspiration contre la personne du Roi, dont le duc d'Aveiro se déclara le chef. Ce duc, sachant que le Roi devait se promener en carrosse, embusqua des conjurés sur le chemin où il devait passer. Le cocher fut tué du premier coup, et de l'autre, le Roi eut le bras cassé. Longtemps après, le secret de la conjuration fut découvert par des lettres que les chefs du parti écrivaient au Brésil pour y causer un soulèvement. Le duc d'Aveiro et ses complices furent arrêtés; ils déposèrent unanimement que cet attentat leur avait été suppédité par les jésuites, instigateurs de tout ce qui venait d'arriver. Le Roi voulut faire une punition exemplaire des auteurs de cet abominable complot. Son juste ressentiment, armé des lois, soutenu par les tribunaux, devait éclater contre les jésuites. Le Pape prit leur défense, et s'y opposa ouvertement. Toutefois ces pères furent bannis du royaume; ils allèrent à Rome, où ils furent recueillis, non comme des rebelles et des traîtres, mais comme des martyrs qui avaient souffert héroïquement pour la foi. Il n'y manquait que des récompenses pour rendre la mémoire du Pape et de son pontificat plus en exécration à la postérité. Jamais la cour de Rome n'avait donné un tel scandale. Quelque vicieux que fussent les pontifes que les siècles précédents avaient détestés, aucun d'eux cependant