<281>père, pour l'honneur de Sans-Souci, que l'année prochaine il ne se trouvera pas dans le même cas de disette. La galerie de tableaux que je forme est toute nouvelle; je n'ai rien pris de la galerie de Berlin; cependant j'ai déjà ramassé près de cent tableaux, dont il y a deux Corréges, deux Guides, deux Paul Véronèses, un Tintoret, un Solimène, douze Rubens, onze van Dycks, sans compter les autres maîtres de réputation. Il me faut encore cinquante tableaux; j'en attends d'Italie et de Flandre avec lesquels je crois pouvoir compléter ma galerie. Vous voyez, ma chère sœur, que la philosophie ne bannit pas toujours la folie de la tête des hommes; celle des tableaux sera courte chez moi, car dès qu'il y en aura assez selon la toise, je n'achète plus rien.

Je plains le pauvre Bonin;a c'était un garçon d'une ambition démesurée, mais qui d'ailleurs avait du mérite. La poste va partir; il ne me reste qu'à vous embrasser tendrement, en vous assurant de la vive tendresse avec laquelle je suis à jamais, ma très-chère sœur, etc.

309. A LA MÊME.

Le 7 décembre 1755.



Ma très-chère sœur,

Le chasseur m'a rendu votre chère lettre à mon retour de Berlin, où j'ai été rendre mes devoirs à notre chère mère. Elle a eu une fluxion de poitrine; mais, grâce au ciel, tout le danger est passé. Elle est encore un peu faible; cependant de jour en jour elle se remet, de sorte que nous n'avons à présent rien à appréhender. J'en reviens au chasseur, qui m'assure vous avoir laissée en assez bonne santé, ce qui me fait grand plaisir. Vous avez trop de bonté, ma chère sœur, de prêter attention aux bagatelles par lesquelles j'ai pu vous servir, et de recevoir en bonne part et la musique, et mille bagatelles que j'ai pris la liberté de vous of-


a Le colonel Bonin, mort à Baireuth le 19 novembre,