<207>le moyen de me sauver à Potsdam, où je suis plus à moi-même, et où je puis être mélancolique sans que personne y trouve à redire.

Je vous souhaite de tout mon cœur que vous soyez à l'abri de pareils malheurs, qui, sans contredit, sont les plus grands du monde pour des personnes capables de sentiment. Tous mes vœux se réunissent pour vous, ma chère sœur; ce sont les sentiments avec lesquels je suis jusqu'au dernier soupir de ma vie, ma chère sœur, etc.

236. A LA MÊME.

(Berlin, 24 janvier 1752.)



Ma très-chère sœur,

Toutes vos lettres redoublent la tendresse que j'ai pour vous; il n'y a qu'une vraie amie qui puisse écrire une lettre comme celle que je viens de recevoir de votre part. Vous entrez dans mes petits chagrins, vous y prenez part, et vous compatissez à ma sensibilité. Il ne s'agit, à la vérité, que d'un chien; mais tout ce que vous m'écrivez de Folichon est précisément le cas où je me suis trouvé avec Biche. Le ciel nous a donné une même humeur et un même cœur. Je pense comme vous sur notre raison; je la crois bonne pour la société, mais fort incommode pour l'individu. Je pars après-demain pour Potsdam, et je ne saurais vous dissimuler que je sens une joie secrète de me retrouver dans ma chère retraite. Je me réjouis sur le plaisir de NOUS revoir, comme les chrétiens sur le jubilé. Venez ici pour voir un ami, et, je vous prie, usez-en de même avec moi sans contrainte et sans gêne; et si vous le voulez bien, nous bannirons toute cérémonie quelconque, pour que je puisse mieux jouir de vous. Les derniers temps que j'ai eu le bonheur de vous voir ici sont ceux où j'ai le mieux profité de vous; commençons, si vous le voulez, par où nous avons fini, et le peu de temps que je pourrai vous