<173>voyer, pour ainsi dire, à la besace, après l'éclat que j'ai fait. Je laisse ceci à votre décision comme à un frère chéri, à un véritable ami, et comme à un juge éclairé. Je remets mon honneur et ma réputation entre vos mains. Il n'y a que vous, mon très-cher frère, qui puissiez mettre mon esprit et mon cœur en repos sur ce sujet, en lui rendant ce que son père lui a légué. Elle est résolue, à cette condition, de quitter pour jamais ce pays. Je vous conjure à mains jointes de m'accorder cette grâce. J'ajouterai cette obligation à tant d'autres que je vous dois; je ne cesserai de la reconnaître ma vie durant, ni d'être jusqu'au tombeau avec la plus vive tendresse et le plus parfait respect, mon très-cher frère, etc.

202. A LA MARGRAVE DE BAIREUTH.

Le 27 février 1748.



Ma très-chère sœur,

Je suis pénétré des marques d'amitié que vous me témoignez, ma chère sœur, et je puis vous assurer que mon cœur y répond avec toute la sensibilité imaginable. Il a toujours été le même à votre égard, et comment ne l'aurait-il pas été? Les sujets de différends que nous avons eus étaient si minces dans leur origine, que c'aurait été bien méconnaître les lois de l'amitié que de se brouiller sérieusement pour des choses qui en valaient si peu la peine. Votre bon cœur a jugé des autres par lui-même. Si vous avez été trompée, la perfidie en est d'autant plus affreuse, et vous n'avez aucun reproche à vous faire. Il est vrai que vous mériteriez de trouver toujours des cœurs semblables au vôtre; mais ils sont rares, ma chère sœur; plus on connaît le monde, et plus on se persuade que la vertu ne se place que dans les discours, que la plupart des gens la méconnaissent, et que l'amour, l'intérêt et l'ambition sont les tyrans qui gouvernent despotiquement l'espèce humaine. Néanmoins n'ayez aucun regret de votre