<347>on prétend qu'ils réclament des droits qu'ils ont recherchés dans les archives, en Hongrie.

229. AU PRINCE HENRI.

(Berlin) 23 janvier 1771.



Mon très-cher frère,

Comme cette lettre vous sera rendue sur ma frontière, je crois, mon cher frère, pouvoir vous féliciter hardiment à présent d'avoir heureusement terminé votre voyage. Je vous considère comme Pythagore ou Platon, qui voyageaient chez les Scythes et les peuples les plus barbares, pour approfondir les secrets de la nature et recueillir des connaissances. Je vous avoue que je consens à admirer fort tout ce que vous avez vu d'admirable, mais que pour tous les trésors du monde on ne me ferait point aller d'où vous venez. Je vous remercie mille fois de ce que du fond de la Scythie vous vous ressouvenez encore de mon vieux jour de naissance et de ma chétive personne. Je vous avoue, mon cher frère, que j'aime mille fois mieux vous savoir ici que parmi les barbares d'où vous venez. Les lions les plus apprivoisés donnent souvent des marques que l'instinct de leur naturel féroce ne se dompte pas, et je crois qu'il en est de même des Russes. Je vous remercie de la bonté que vous avez de m'envoyer des cailles fumées. Je suppose que c'est de l'espèce dont les Juifs mangèrent en traversant le désert de Sina et d'Horeb;a toutefois ce souvenir obligeant m'est bien précieux, et je me réjouis d'avance sur votre retour. Mais il faut vous préparer d'avance, mon cher frère, à être bien questionné; c'est un tribut que tout voyageur doit payer, à son retour, à ses compatriotes. Je voudrais à présent qu'il gelât fort et ferme, pour que votre voyage en fût moins fatigant et plus agréable; sans quoi je crains, mon cher frère, que vous serez arrêté désagréablement en des endroits où vous n'au-


a Exode, chap. XVI, v. 13 et 14.