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21. DU PRINCE DE PRUSSE.

Berlin, 12 février 1748.



Mon très-cher frère,

J'ai été extrêmement surpris des nouvelles que vous m'avez fait l'honneur de m'écrire, mon très-cher frère. La mauvaise action que M. de Walrave a commisea me confirme encore plus que jamais dans l'opinion que l'intérêt est la mère de tous les vices, et que les personnes qui y sont enclines oublient souvent les sentiments d'honneur pour assouvir leur infâme passion.

Les gazettes ont longtemps annoncé la donation des troupes du duc de Brunswic au service des Hollandais. Il est triste que le sang des hommes soit ainsi mis à l'encan; mais comme bien d'autres abus se sont introduits dans le monde, celui-ci a d'autant plus eu de facilité, à cause du gain qu'il rapporte. Je crois que l'avancement au maréchalat du prince Louis aura été un des principaux motifs qui aura déterminé le Duc.

Toute expression ne serait suffisante pour vous marquer les sentiments de vénération, d'attachement et, si j'ose dire, d'amitié que je vous porte. Soyez persuadé, mon très-cher frère, qu'ils ne me quitteront qu'à la fin de ma vie, étant, etc.


a Le public de Berlin soupçonnait le général de Walrave d'avoir communiqué à plusieurs ministres étrangers les plans des places fortes de la Silésie, et des cartes de cette province. Les journaux ne parlaient que de malversations; mais le public ne les croyait pas. Nous devons ces détails à la lettre inédite du Prince de Prusse au Roi, du 15 février 1748. Le général-major de Walrave, chef du régiment des pionniers, à Neisse, arriva à Berlin le 30 janvier 1748, et fut arrêté à Potsdam le 10 février suivant.