<569>valerie en troisième. Je fis toute la diligence possible pour bien appuyer mes ailes sur ces hauteurs, en y mettant des flancs. L'infanterie de la droite gagna son poste, et je pris toutes les précautions pour le bien assurer, le regardant comme mon salut et comme la principale sûreté de l'armée. Ma gauche, en se formant, entra d'abord dans un engagement avec les pandours et les grenadiers de l'ennemi, postés dans des enclos de vignes fermées par des murailles de pierre.

Nous avançâmes de cette façon jusqu'à l'endroit où les montagnes versent vers l'ennemi, où nous vîmes la ville de Lowositz garnie par un gros corps d'infanterie, une grosse batterie de douze pièces de canon devant, et de la cavalerie formée en échiquier et en ligne entre Lowositz et le village de Sulowitz. Le brouillard était épais, et tout ce que l'on pouvait distinguer était une espèce d'arrière-garde de l'ennemi, qui ne demandait qu'à être attaquée pour se replier sur ses derrières. Comme j'ai la vue mauvaise,a j'ai consulté de meilleurs yeux que les miens, pour me rendre compte de ce qui se passait, qui ont vu tout comme moi. J'ai envoyé pour les reconnaître, et tous les rapports que j'ai reçus ont été conformes à ce que j'en avais jugé.

Après donc que je trouvai mes vingt-quatre bataillons placés dans cette trouée comme je le croyais convenable, je crus qu'il ne s'agissait plus que de faire repousser cette cavalerie qui était devant moi, et qui prenait toutes sortes de figures, comme vous en pourrez juger à peu près par le mauvais dessin que je vous envoie ci-joint.b Sur cela, je fis déboucher trente escadrons de cavalerie, qui attaquèrent celle de l'ennemi. Ils la poussèrent avec trop de vigueur, en donnant dans le feu du canon ennemi, ce qui, après une vigoureuse résistance, les obligea à se reformer sous la protection de mon infanterie. A peine cette attaque fut-elle passée, que mes soixante escadrons, sans attendre mes ordres, et très-fort contre ma volonté, attaquèrent une seconde fois. Un feu de soixante canons dans leurs deux flancs ne les empêcha pas de battre totalement toute la cavalerie autrichienne. Mais ils


a Voyez, le Mémoire sur le roi de Prusse Frédéric le Grand, par Msgr. le P. de L .... (le prince de Ligne). Berlin, 1789, p. 21.

b Ce dessin est perdu.