<433>de ne faire aucune ouverture à M. Beausobre, de peur que je me voie hérésiarchisé sans y avoir pensé.

Je crois qu'il prêcherait très-bien sur cette matière; mais comme il n'y est pas plus savant qu'aucun de nous, il ne satisferait pas ma curiosité. Saint Paul s'avise mal à propos de nous faire le commencement d'une description très-miraculeuse. Lorsqu'il croit avoir poussé la curiosité du lecteur à son comble, il finit comme certain sonnet de Scarron :

Sur ce superbe mont jusqu'aux cieux élevé, Pour vous dire la chose en homme véritable, Il ne m'est, sur mon Dieu, jamais rien arrivé.a

Tout ce que M. Beausobre pourrait faire, ce serait de deviner ce que saint Paul a vu. Non, j'aimerais mieux l'entendre prêcher sur une autre matière, où la révélation lui fournira des réflexions plus solides. La nécessité du jugement futur, par exemple, lui en fournirait. C'est une telle matière qui lui donnerait occasion de déployer son ... et son éloquence, et le fruit que l'on tirerait d'un pareil sermon serait plus solide que celui de satisfaire une simple curiosité.

J'en viens à votre seconde, qui m'a fait rougir plus d'une fois, et qui me fait connaître, mon cher Quinze-Vingt, que, malgré toute la pénétration que vous avez, vous me prenez pour plus que je ne vaux. Je vous prie, désabusez-vous sur ce chapitre, et ne me donnez que la juste valeur. Je souhaiterais de pouvoir égaler ... le portrait que vous faites de moi; et l'unique mérite que je me connais, c'est d'en avoir une forte envie. Si j'avais le bonheur d'y parvenir avec le temps, je n'oublierais jamais que c'est vous qui m'avez tracé le modèle que je dois suivre, heureux si je puis jamais vous en marquer ma reconnaissance.

La lettre de Beausobre que vous m'envoyez dans votre dernière est très-bien écrite; mais je trouve que c'est plutôt à moi à regretter l'âge avancé dans lequel il est qu'à lui de se plaindre de ce qu'il se voit si près de la fin d'une carrière laquelle il a si dignement fournie. Que l'avenir me serait indifférent, si, à un


a Œuvres de Scarron, Paris, 1752, petit in-8, p. 69, Sonnet, commençant par les mots : « Un mont tout hérissé, etc. »