<426>feu pour en arrêter le cours; d) qu'un homme également vertueux dans toutes ses actions est, à mon avis, un phénix qui n'exista jamais, et que Socrate, par conséquent, pouvait être fort vertueux, sans être un vertueux universel ou parfait, c'est-à-dire, sans exercer également toutes les espèces de vertus morales. Mais je n'ai pas besoin de tous ces arguments pour sauver la mémoire de cet oracle de l'antiquité.

Je sais que bien des gens, de ses contemporains même, l'ont accusé de ce vice honteux; mais je sais aussi que les auteurs les plus graves et les plus dignes de foi ont soutenu hautement le contraire, et l'ont entièrement lavé de cette tache. Que V. A. R. se souvienne de ce qu'en dit Plutarque, l'écrivain le plus sage et le plus véridique de l'antiquité. « Socrate ne cherchait point avec lui, dit-il dans la Vie d'Alcibiade, une volupté efféminée et indigne d'un homme, et ne demandait point de ces faveurs infâmes et criminelles » (notez, s'il vous plaît, monseigneur, que Plutarque est un auteur païen, et que ces paroles prouvent évidemment que la morale des païens vertueux n'autorisait nullement ces sortes de vices); « mais il guérissait la corruption de l'âme d'Alcibiade, remplissait le vide de son esprit, et rabattait sa vanité insensée. Alors, frappé de la force de ses raisons victorieuses, Alcibiade fit, pour me servir de ce proverbe, comme un coq qui, après un long combat, va traînant l'aile, et se reconnaît vaincu. Il fut persuadé que le commerce de Socrate était véritablement un secours que les dieux envoyaient aux jeunes gens pour leur instruction, etc. » Ce sont les propres paroles de Plutarque, selon la traduction de Dacier.

V. A. R. veut-elle d'autres témoignages? Qu'elle prenne la peine de chercher l'article de Socrate dans Moréri. Elle y trouvera que ce jésuite assure sur la foi de Platon, de Xénophon, d'Eusèbe et de tant d'autres auteurs anciens et modernes, que Socrate était un homme parfaitement sage et vertueux, qu'il était nommément modéré, sobre et chaste, et que, en un mot, toutes les vertus lui étaient naturelles.

2o N'ayant pas allégué le refus que Cimon donna à Callias, qui lui demanda Elpinice, comme un grand effort de vertu, je n'examinerai pas le motif qui porta ce grand homme à refuser