<97>pied de la lettre vos paroles trop obligeantes; mais le principe m'en est trop précieux; je ne veux jamais le révoquer en doute. Veuillez de même être bien persuadé de mes sentiments, et de la haute considération avec laquelle je suis, etc.

51. A L'ÉLECTRICE MARIE-ANTONIE DE SAXE.

Sans-Souci, 4 novembre 1765.



Madame ma sœur,

Je crois, madame, qu'il faut servir ses amis à leur guise, et, pour ce qui est de l'opinion des hommes, qu'il ne faut pas les combattre. Si j'avais un ami égyptien, je lui ferais mettre sans balancer de l'argent en sa main mourante, pour qu'il en pût payer Caron au passage du Styx. Si c'était un Turc, je lui ferais passer un vernis, pour que le diable ne pût pas entrer dans son corps. Ma religion incommodera moins mes amis, car je n'exige aucune dépense, ni pour me vernir, ni pour payer Caron, ni pour sortir du purgatoire. Je serai moins à charge, et c'est toujours quelque chose. La bonne madame Lodron ne me l'a point été. Son bon appétit et son estomac faisaient, madame, honneur à votre cour. Elle sera à présent dans la gloire éternelle, entre Apicius, Lucullus et les fameux gourmets de l'antiquité, à manger des jambons de neige et à chanter alleluia. Je présente à madame de Zehmen également mes faibles services, et quinze cents prêtres avides des De profundis. Je souhaite toutefois qu'elle n'en ait pas sitôt besoin, et qu'elle serve longtemps V. A. R. à votre plus grande satisfaction, madame.

Dans ces pays du nord, le feu de cheminée supplée à ce qui manque de chaleur au soleil. Il faut recourir à ce feu presque toute l'année. Le feu de votre beau génie n'a pas besoin de cette chaleur factice; il se suffit à lui-même. Il est comme le flambeau de la nature, qui donne et communique la vertu dont il est em-