<69>spectateurb passif de tout ce qui se passe, et qui peut, madame, vous déplaire. Je fais comme les dogues qui se sont longtemps battus avec acharnement, je sèche mes plaies; je vois que la plupart des puissances de l'Europe en font autant; trop heureux que, tandis qu'on fait des rois à droite et à gauche, la tranquillité publique ne s'en trouve pas troublée, et que chacun continue à demeurer en repos auprès de son foyer et de ses pénates. Pour moi, madame, qui suis le plus pacifique de tous vos serviteurs, je me réjouis de ce que nous conservons la paix, et je pense, madame, que, quant à vos désirs, vous n'avez pas tant perdu, parce que ce qui ne se fait pas un jour peut se faire un autre, et qu'avec de la patience et l'occasion on vient à bout de tout. Je me trouverai trop heureux, d'ailleurs, si je puis donner à V. A. R. des marques de la haute estime et de l'admiration avec laquelle je suis, etc.

27. DE L'ÉLECTRICE MARIE-ANTONIE DE SAXE.

Dresde, 3 août 1764.



Sire,

Je n'accuserai jamais d'incongruité les citations que Votre Majesté voudra faire; mais j'étais fâchée, Sire, de vous voir donner dans la prédestination arbitraire et absolue, et je remarque avec joie, dans la dernière lettre dont vous m'avez honorée, que vous n'êtes pas si calviniste. V. M. me fait espérer que la maison de Saxe ne doit pas être à jamais un vase de réprobation,a et qu'elle peut voir encore des jours plus heureux. J'en accepte l'augure; nous ne manquons pas de patience, Sire; une trop longue école nous y a formés, et quant à l'occasion, si V. M. veut bien contribuer à la faire naître, je joindrai le doux senti-


b Le mot spectateur, ou tel autre mot équivalent, est omis dans notre manuscrit.

a Épître de saint Paul aux Romains, chap. IX, v. 22.