<525>de ces matières, mais avec moins de succès que lui. Cet académicien, Sire, est bien digne de la protection et des bontés de V. M.

Recevez, Sire, avec votre bonté ordinaire les vœux ardents que je fais pour la conservation de vos jours précieux, pour la prospérité de vos entreprises, et pour la gloire et le bonheur que V. M. mérite à tant d'égards. C'est avec ces sentiments, et avec le plus tendre et le plus profond respect, que je serai jusqu'au dernier soupir, etc.

95. A D'ALEMBERT.

Le 29 janvier 1771.

Moi qui n'arrange que des mots, j'ai été fort étonné qu'un philosophe qui ne s'occupe que des choses veuille que je lui envoie des syllabes mesurées à la toise, et peut-être même mal mesurées. Malebranche méprisait la poésie; Newton, je crois, en tenait assez peu compte; et Copernic faisait plus de cas des Éphémérides de Ptolémée que de l'Iliade et de l'Énéide. Quelle impression des fictions peuvent-elles faire sur un esprit amoureux de vérités? Mais cet esprit ne peut pas toujours être tendu, il faut du relâche après de grands efforts; et puis, quand on a fait quelque séjour à Ferney, on peut se réconcilier avec la poésie. Voilà comme j'ai raisonné; ensuite les réflexions sont survenues; je me suis dit : Si tu faisais des vers comme ceux de Voltaire, tu pourrais les envoyer hardiment, fût-ce même à Diagoras; mais les tiens sont des avortons d'une imagination faible et d'un ignorant dans la langue des Velches. Je me suis arrêté, j'ai été indécis ou même découragé; un moment après, j'ai réfléchi sur la façon dont on en use avec ceux qui jouent ce qu'on appelle de grands rôles, et je me suis dit : On nous traite comme des enfants; quand nous balbutions à peine, on nous dit que nous haranguons comme Cicéron; s'il nous arrive d'ajuster une rime au bout de quelques mots, on est étonné de l'étendue de notre génie; et quand nous marchons lourdement, on nous compare à des danseurs de