<342>par lui que les Goths, les Suèves ou Vandales, les Longobards, les Angles, les Rugiens, les Hérules et autres grands peuples, qui ont ensuite renversé l'empire romain, ont eu leurs anciens siéges entre l'Elbe et la Vistule, dans les contrées qui sont présentement soumises à la domination de V. M. J'espère qu'elle ne prendra pas en mauvaise part la liberté que je prends de lui présenter ce petit essai.

[Frédéric à M. de Hertzberg, (Breslau, 29 avril 1779)]

Le Roi renvoya au ministre sa lettre une demi-heure après, avec la réponse suivante, écrite en marge de la propre main du Roi :

J'ai lu cet essai de traduction de Tacite que vous m'envoyez, contre lequel il n'y a rien à dire; mais c'est la description des mœurs des Germains. Ce n'est pas ce qu'il y a de difficile à traduire, mais son style sentencieux et énergique dont il trace en peu de mots les caractères et les vices des empereurs romains. Que les traducteurs s'essayent sur la vie de Tibère, sur Claude; ce style laconique et pittoresque en même temps, où au moyen de deux mots il exprime tant de choses, c'est ce qui mérite l'imitation de nos auteurs. Peu de paroles et beaucoup de sens, voilà ce que nos écrivains doivent se prescrire comme la règle inviolable de leurs productions. Quot verba, tot pondera.a Je vous demande pardon de ce que mon ignorance a la hardiesse de citer du latin à votre sapience; mais c'est une présomption que j'espère que vous me pardonnerez.

[M. de Hertzberg à Frédéric, Sans-Souci, 8 novembre 1780]

Le Roi composa dans la suite l'écrit connu sous le titre : De la littérature allemande, etc.b Il fit venir M. de Hertzberg, au mois de novembre 1780, à Sans-Souci, et après lui avoir lu ce mémoire, il le chargea de le faire imprimer en français. M. le comte, trouvant la critique de Sa Majesté sur la langue allemande trop sévère, s'efforça de justifier celle-ci de bouche, et envoya au Roi la traduction


a Voyez t. VII, p. 120, et Büsching, Character Friedrichs des Zweiten, seconde édition, p. 32.

b Voyez t. VII, p. 103-140. Frédéric touche le même sujet dans sa lettre à Voltaire, du 6 juillet 1737 (t. XXI, p. 85-88).