<276>me pénétrer assez de cette admiration profonde et de la haute vénération avec laquelle je suis, etc.

187. A L'ÉLECTRICE MARIE-ANTONIE DE SAXE.

(Potsdam) 15 mars 1775.



Madame ma sœur,

Si je me suis ingéré de parler à Votre Altesse Royale d'Apollon et des Muses, c'est sur la foi des poëtes. Selon ce qu'ils en disent, ces habitants du Parnasse auraient dû faire exactement ce que j'ai pris, madame, la liberté de vous écrire. Peut-être Apollon s'est-il transformé en Bavarois pour d'autant mieux vous servir, et, content de secourir V. A. R., il n'a pas cru le vulgaire digne de se faire connaître à lui. Mais, supposé que ce dieu ne soit pour rien dans cette heureuse cure, le chirurgien qui l'a achevée passera toutefois à mes yeux pour un grand esculape, puisque nous lui devons, madame, la fleur des princesses d'Allemagne, qu'il nous a conservée, et que j'aurais regardé cette perte comme irréparable. Il est bien naturel que V. A. R. aime la vie : elle se voit adorée de tout le monde; elle jouit de l'amour de sa famille et de sa postérité, dont elle peut espérer de voir tous les jours augmenter le nombre; elle peut se suffire à elle-même par les talents que la nature, d'ailleurs avare, lui a prodigués. Il n'y a peut-être que le prince Louis de Würtemberg qui, plongé dans sa théologie ténébreuse, préférerait le ciel à la terre.

V. A. R. me parle de la paix; je n'ose presque pas prononcer ce nom devant elle, après l'avoir si étourdiment annoncée. Pour cette fois que les parties belligérantes sont d'accord, et que tout est conclu, il m'est permis d'en parler; aussi, madame, ne m'arrivera-t-il de ma vie de prophétiser que des choses passées; c'est le seul moyen de rencontrer juste. Pour toutes les vicissitudes de ce monde-ci, je les crois, madame, nécessaires, par la raison