<246>avec plus de précision et de promptitude, et de glandes machines mues par des ressorts plus simples. Il n'y avait qu'un Marc-Aurèle; je ne vois qu'un Frédéric qui le surpasse, mais je vois en même temps plusieurs souverains qui l'égalent. Il semble, Sire, qu'il soit réglé par le destin que plus on appartient de près à V. M., plus on est doué de toutes les qualités qui font le héros. Quoi de plus surprenant que cette révolution de Suède, opérée par le Roi votre neveu!a Quel calme dans un aussi grand danger et clans une entreprise si importante! Quelle intrépidité, quelle activité, et cependant quelle modération, tout cela à l'âge de vingt-six ans, à cet âge où tout chez les hommes ordinaires, jusqu'à la vertu et à l'amour du bien, devient passion! J'admire un gouvernement sage et modéré que je vois naître tout à coup du sein de l'anarchie la plus complète; cette admiration m'occupe agréablement, et je m'imagine quelquefois qu il y a une sorte de mérite à sentir vivement le grand et le beau. Que de sujets d'admiration ne me fournit pas Frédéric! A peine en croit-on à la voix. Son nom obscurcira tous ses contemporains dans les annales de ce siècle, et la postérité ne voudra lire que ses faits. Je ne suis jamais plus glorieuse que quand il m'arrive une lettre de ce héros admirable, ni plus heureuse que lorsque j'y réponds.

Recevez, Sire, de la femme de la terre qui vous révère le plus l'hommage de la haute estime et de l'inviolable attachement avec lequel je suis, etc.

164. A L'ÉLECTRICE MARIE-ANTONIE DE SAXE.

Le 24 novembre 1772.a



Madame ma sœur,

Le pinceau d'Apelles embellissait tous ses originaux, comme la belle imagination de Virgile relevait les héros qu'il célébrait.


a Voyez t. VI, p. 53 et 54.

a Potsdam, 21 novembre 1772. (Variante du manuscrit des Archives.)