<119>projet d'entrevue avec l'Empereur. J'ai dû faire et j'ai fait des vœux pour qu'elle eût lieu; le motif qui vous animait, Sire, est digne de vous. Au reste, ce sentiment m'a paru dans le cœur de ce prince; quoique avide d'acquérir tous les talents qui peuvent former le grand capitaine, il appréhende la triste nécessité d'en faire usage. Comme vous, Sire, il sent tout le prix de la vraie gloire, celle d'assurer le repos et le bonheur de ses peuples. Cette conformité d'inclinations n'offre rien que de consolant pour l'humanité, et en particulier pour la Saxe, qui doit prendre tant d'intérêt au maintien de la paix. Je suis, etc.

69. A L'ÉLECTRICE MARIE-ANTONIE DE SAXE.

Le 10 août 1766.



Madame ma sœur,

A moins que Votre Altesse Royale ne veuille qu'on soit aveugle, stupide, et une espèce d'être qui n'a que la végétation, elle ne pourra pas trouver à redire à ce qu'on rende justice à son grand mérite. Prenez, madame, le plus simple des villageois; il vous dira que le soleil est un astre brillant, que les diamants ont un éclat admirable, que l'or est le plus pur de tous les métaux; il ne faut que sentir pour éprouver ces différentes impressions. J'aurais ici un beau champ pour déployer mes pensées; mais ne craignez rien, madame, je ferai un effort sur moi pour ménager votre extrême modestie; je me dirai tout seul ce que je n'ose vous écrire sur votre propre sujet, et il n'y aura pas le moindre petit mot, dans ma lettre, dont V. A. R. ait à se plaindre.

L'approbation dont vous honorez, madame, l'Empereur est sans doute le plus beau fleuron de sa couronne; j'en ai ouï dire mille biens. Cet empereur est pour moi comme l'arche qu'un voile dérobait aux yeux du vulgaire; c'est au grand prêtre qui lève quelquefois ce voile, et qui s'introduit dans le sanctuaire,