<420>M. le comte de Montmorency-Laval saura bientôt assez d'allemand pour faire tourner à droite et à gauche, et pour commander l'exercice; mais, en vous entendant parler français, il donnera la préférence à la langue des Montmorency; sans doute les hommes de sa maison doivent aimer les Prussiens. Il n'y a jamais eu que le cardinal de Bernis qui ait imaginé d'unir la France avec la maison d'Autriche contre la maison de Brandebourg;a il en a été bien puni. Sa politique a été aussi malheureuse que les chimères théologiques de trente autres cardinaux ont été ridicules.

Je ne sais si les chariots de poste ont apporté à V. M. le petit paquet contenant deux exemplaires du petit livre contre la torture et contre la Caroline de Charles-Quint; nous allons tâcher d'être humains chez nos Suisses; ce sera à votre exemple; vous en donnez à la terre entière dans tous les genres. Je me jette à vos pieds du fond de mon trou, avec tout le respect, toute la reconnaissance, toute l'admiration que vous ne pouvez pas m'empêcher de ressentir, quoique cela doive vous être fort indifférent dans le comble de votre grandeur et de votre gloire.

569. A VOLTAIRE.a

Le 25 janvier 1778.

J'ai reçu la brochure d'un sage, d'un philosophe, d'un citoyen zélé, qui éclaire modestement le gouvernement sur les défauts des lois de sa patrie, et qui démontre la nécessité de les réformer. Cet ouvrage mérite d'être approuvé par tout le monde. En fait d'équité naturelle et de droite raison, il n'y a qu'un sentiment, qui est celui de la vérité, lequel vous avez lumineusement démontré. Pourquoi ne le suivra-t-on pas? A cause qu'on craint plus le travail qu'on n'aime le bien public, à cause de l'ancien-


a Voyez t. IV, p. 38, 255 et 256.

a Œuvres posthumes, t. IX, p. 362-366.