<131>On me marque de Paris qu'on prépare au Théâtre français, avec appareil, la représentation des Scythes.a Vous ne vous contentez pas d'éclairer votre patrie, vous lui donnez encore du plaisir. Puissiez-vous lui en donner longtemps, et jouir dans votre doux asile des délices que vous avez procurées à vos contemporains, et qui s'étendront à la race future autant qu'il y aura des hommes qui aimeront les lettres, et d'âmes sensibles qui connaîtront la douceur de pleurer! Vale.

403. DE VOLTAIRE.

(Ferney) 5 avril 1767.

Sire, je ne sais plus quand les chiens qui se battent pour un os, et à qui on donne cent coups de bâton, comme le dit très-bien V. M.,a pourront aller demander un chenil dans vos États. Tous ces petits dogues-là, accoutumés à japper sur leurs paliers, deviennent indécis de jour en jour. Je crois qu'il y a deux familles qui partent incessamment, mais je ne puis parler aux autres, la communication étant interdite par un cordon de troupes dont on vante déjà les conquêtes. On nous a pris plus de douze pintes de lait, et plus de quatre paires de pigeons. Si cela continue, la campagne sera extrêmement glorieuse. Ce ne sont pourtant pas les malheurs de la guerre qui me font regretter le temps que j'ai passé auprès de V. M.

Je ne me consolerai jamais du malheur qui me fait achever ma vie loin de vous. Je suis heureux autant qu'on peut l'être dans ma situation; mais je suis loin du seul prince véritablement philosophe. Je sais fort bien qu'il y a beaucoup de souverains qui pensent comme vous; mais où est celui qui pourrait faire la Préface de cette Histoire de l'Église? où est celui qui a l'âme as-


a Tragédie de Voltaire. Voyez ses Œuvres, édit. Beuchot, t. VIII, p. 183-279.

a Voyez t. XII, p. 235.