<114>caractère de Julien. Il ne l'a point appelé apostat. Il faut tenir compte à un janséniste de sa sincérité. Je crois qu'il aurait été plus adroit de lui donner des éloges, comme on applaudit à un enfant qui commence à balbutier, pour l'encourager à mieux faire.

Le passage d'Ammien Marcellin est interpolé sans doute; vous n'avez, pour vous en convaincre, qu'à lire ce qui précède et ce qui suit. Ces deux phrases se lient si bien, que la fraude saute aux yeux. C'était le bon temps, dans les premiers siècles; on accommodait les ouvrages à son gré. Josèphe s'en est ressenti également; l'Évangile de Jean, de même. Tout ce qui m'étonne, c'est que messieurs les correcteurs ne se soient pas aperçus de certaines incongruités qu'ils auraient pu rectifier avec un coup de plume, comme la double généalogie, la prophétie dont vous faites mention, et nombre d'erreurs de noms de villes, de géographie, etc., etc.; les ouvrages marqués au sceau de l'humanité, c'est-à-dire, de bévues, d'inconséquences, de contradictions, devaient ainsi se déceler eux-mêmes. L'abrutissement de l'espèce humaine, durant tant de siècles, a prolongé le fanatisme. Enfin vous avez été le Bellérophon qui a terrassé cette Chimère.

Vivez donc pour achever d'en disperser les restes. Mais surtout songez que le repos et la tranquillité d'esprit sont les seuls biens dont nous puissions jouir durant notre pèlerinage, et qu'il n'est aucune gloire qui en approche. Je vous souhaite ces biens, et je jure par Épicure et par Aristide que personne de vos admirateurs ne s'intéresse plus que moi à votre félicité.

395. AU MÊME.a

(Décembre 1766.)

Je vous fais mes remercîments pour la belle tragédieb que je viens de recevoir, et pour les ouvrages intéressants que j'attends


a Œuvres posthumes, t. X, p. 17-20.

b Le Triumvirat. Œuvres de Voltaire, édit. Beuchot, t. VIII, p. 75-163.