<272>Il ne veut point avoir d'esprit. Le défaut de Fontenelle est qu'il en veut toujours avoir; c'est toujours lui qu'on voit, et jamais ses héros; il leur fait dire le contraire de ce qu'ils devraient dire; il soutient le pour et le contre; il ne veut que briller. Il est vrai qu'il en vient à bout; mais il me semble qu'il fatigue à la longue, parce qu'on sent qu'il n'y a presque rien de vrai dans tout ce qu'il vous présente. On s'aperçoit du charlatanisme, et il rebute. Fontenelle me paraît dans cet ouvrage le plus agréable joueur de passe-passe que j'aie jamais vu. C'est toujours quelque chose, et cela amuse.

Je joins à Marc-Aurèle deux rogatons que V. M. n'a peut-être pas vus, parce qu'ils sont imprimés à la suite d'un grimoire sur le carré des distances, lequel n'est point du tout amusant.

Mais, en récompense des chiffons que j'envoie, j'attends le sixième chant de votre Art;a j'attends le toit du temple de Mars. C'est à vous seul à bâtir ce temple, comme c'était à Ovide de chanter l'amour, et à Horace de donner la Poétique. Sire, faites des revues, des ports, des heureux :

Sous vos aimables lois je me flatte de l'être.
Aux yeux de l'avenir vous serez un grand roi,
Et, grâce à votre gloire, on voudra me connaître.
On dira quelque jour, si l'on parle de moi :
Voltaire avait raison de choisir un tel maître.

283. DU MÊME.

(1751.)

Sire, j'ai lu, la nuit et ce matin, depuis le Grand Électeur jusqu'à la fin, parce qu'on ne peut pas lire deux moitiés à la fois. Quand vous n'auriez fait que cela dans votre vie, vous auriez une très-grande réputation. Mais cet ouvrage, unique en son genre, joint aux autres, et, par parenthèse, à cinq victoires et


a Le poëme de l'Art de la guerre.