<161>Hercule enchaîné et retenu par trop d'entraves doit perdre sa force, et devenir plus flasque que le lâche Paris.

Il semble que le Dauphin ne se marie que pour exercer votre génie. Sémiramis fait autant de bruit en Allemagne que la nouvelle dauphine en fait en France. Mettez-moi donc en état de juger ou de l'une ou de l'autre, et de joindre mes suffrages à ceux de Versailles.

Maupertuis se remet de sa maladie. Toute la ville s'intéresse à son sort; c'est notre palladium, et la plus belle conquête que j'aie faite de ma vie. Pour vous, qui n'êtes qu'un inconstant, un ingrat, un perfide, un ... que ne vous dirais-je pas, si je ne faisais grâce à vous et à tous les Français, en faveur de Louis XV!

Adieu; les vêpres de la comédie sonnent. Barbarin,a Cochois,b Hauteville,c m'appellent; je vais les admirer. J'aime la perfection dans tous les métiers, dans tous les arts; c'est pourquoi je ne saurais refuser mon estime à l'auteur de la Henriade.

222. DE VOLTAIRE.

Paris, 5 février 1747.

Sire, eh bien! vous aurez Sémiramis; elle n'est pas à l'eau rose; c'est ce qui fait que je ne la donne pas à notre peuple de Sybarites, mais à un roi qui pense comme on pensait en France du temps du grand Corneille et du grand Condé, et qui veut qu'une tragédie soit tragique, et une comédie comique.

Dieu me préserve, Sire, de faire imprimer l'Histoire de la guerre de 1741! Ce sont de ces fruits que le temps seul peut mûrir; je n'ai fait assurément ni un panégyrique, ni une satire; mais


a La célèbre danseuse Barberina.

b Marianne Cochois, sœur cadette de madame d'Argens. Voyez le Palladion (t. XI, p. 239), où le Roi vante « un pied Cochois. »

c La jolie figure de madame de Hauteville est l'objet des éloges du marquis d'Argens dans sa lettre au Roi. du 15 août 1747. Voyez t. XIX, p. 19.