<124>Vos faveurs étaient dangereuses
Aux rois, qui le méritent bien;
Car tous ces gens-là n'aiment rien,
Et leurs promesses sont trompeuses.
Mais moi, qui ne vous trompe pas,
Et dont l'amour toujours fidèle
Sent tout le prix de vos appas,
Moi, qui vous eusse aimé cruelle,
Je jouirai sans repentir
Des caresses et du plaisir
Que fait votre muse infidèle.

Il pleut ici de mauvais livres et de mauvais vers; mais, comme V. M. ne juge pas de tous nos guerriers par l'aventure de Linz,a elle ne juge pas non plus de l'esprit des Français par les Étrennes de la Saint-Jean,b ni par les grossièretés de l'abbé Desfontaines.

Il n'y a rien de nouveau parmi nos Sybarites de Paris. Voici le seul trait digne, je crois, d'être conté à V. M. Le cardinal de Fleury, après avoir été assez malade, s'avisa, il y a deux jours, ne sachant que faire, de dire la messe à un petit autel, au milieu d'un jardin où il gelait. M. Amelot et M. de Breteuil arrivèrent, et lui dirent qu'il jouait à se tuer : « Bon, bon, messieurs, dit-il, vous êtes des douillets. » A quatre-vingt-dix ans, quel homme! Sire, vivez autant, dussiez-vous dire la messe à cet âge, et moi la servir. Je suis avec le plus profond respect, etc.

198. A VOLTAIRE.

Le 22 février 1743.

Nous avons dit hier de vous tout le bien que l'on peut dire d'un mortel. La salle du souper était un temple où l'on vous faisait


a Voyez t. II, p. 117 et suivantes.

b Lettre à MM. les auteurs des Etrennes de la Saint-Jean; Œuvres de Voltaire, édit. Beuchot, t. XXXIX, p. 369.