<48>maux qu'on appelle hommes, et vous songez encore, malgré cela, à les rendre heureux.

J'ai à répondre aux critiques que V. A. R. a daigné me faire, dans une de ses lettres, au sujet des anciens Romains, qui, dans les

................. champs de Mars,
Portaient jadis du foin pour étendards.b

Le colonel du plus beau régiment de l'Europe a peine à consentir que les vainqueurs de la sixième partie de notre continent n'aient pas toujours eu des aigles d'or à la tête de leurs armées. Mais tout a un commencement. Quand les Romains n'étaient que des paysans, ils avaient du foin pour enseignes; quand ils furent populum late regem,a ils eurent des aigles d'or.

Ovide, dans ses Fastes,b dit expressément des anciens Romains :

Non illi coelo labentia signa movebant,
Sed sua, quae magnum perdere crimen erat;

antithèse assez ridicule de dire : « Ils ne connaissaient point les signes célestes, ils ne connaissaient que les signes de leurs armées. » Il continue, et dit, en parlant de ces enseignes :

Iliaque de foeno; sed erat reverentia foeno,
Quantum nunc aquilas cernis habere tuas
Pertica suspensos portabat longa maniplos :
Unde maniplaris nomma miles habet.

Voilà mes bottes de foin bien constatées. A l'égard des premiers temps de leur histoire, je m'en rapporte à V. A. R. comme sur tous les premiers temps. Que pensez-vous de Rémus et de Romulus, fils du dieu Mars? de la louve? du pivert? de la tête d'homme toute fraîche qui fit bâtir le Capitole? des dieux de Lavinium qui revenaient à pied d'Albe à Lavinium? de Castor et de Pollux combattant au lac Régille? d'Attius Naevius qui coupait des pierres avec un rasoir? de la vestale qui tirait un vaisseau


b Défense du Mondain. Œuvres de Voltaire, édit. Beuchot, t. XIV, p. 138.

a Virgile, Énéide, liv. I, v. 21.

b Livre III, v. 113-118.