<378>qu'à tous vos sujets, qui n'aspirent qu'au plaisir de vous revoir. J'ai l'honneur, etc.

284. AU MARQUIS D'ARGENS.

Dahlen, 25 février 1763.

Votre lettre, mon cher marquis, achève de m'ôter les appréhensions que j'avais pour votre santé. Vous étiez malade la veille de mon départ; mais on m'avait assuré que vous vous étiez mis en chemin le lendemain. Le grand ressort de l'air et l'exercice de la voiture vous ont guéri, ce qui prouve bien l'assertion de Boerhaave que la santé est incompatible avec un entier repos. Je ne sais à quelle destination la nature nous a placés dans le monde. A en juger par notre santé, il paraîtrait qu'elle nous a faits plutôt pour devenir des postillons que des philosophes. J'ai été à Meissen depuis notre séparation. Nous avons reçu des lettres de Vienne qui disent que les préliminaires y ont causé une joie universelle, et que l'Impératrice a pensé embrasser le porteur. Les ratifications arriveront demain ou après-demain au plus tard. Selon mon petit calcul, je ne crois pas quitter la Saxe avant le 12 mars. Il me faut quinze jours pour achever mes affaires en Silésie, et, selon une supputation arbitraire, je ne crois pas pouvoir être à Berlin avant le 29 du mois prochain.

Ce qu'il y a de bon à tout ceci, ce n'est pas moi, mon cher marquis, c'est la paix; il est juste que les bons citoyens et le public s'en réjouissent. Pour moi, pauvre vieillard, je retourne dans une ville où je ne connais que les murailles, où je ne retrouve personne de mes connaissances,a où un ouvrage immense m'attend, et où je laisserai dans peu mes vieux os dans un asile qui ne sera troublé ni par la guerre, ni par les calamités, ni par la scélératesse des hommes. Je suis ici dans une maison de campagne où je passe ma vie en retraite et avec mes occupations


a Voyez t. XVIII, p. 162, 176 et 208, et ci-dessus, p. 348 et 349.