128. DU COMTE ALGAROTTI.

Bologne, 10 février 1761.



Sire,

J'espère que Votre Majesté recevra dans peu des boutargues et une Vie d'Horace. Je me flatte, Sire, que les boutargues réussiront, et je voudrais bien qu'il en fût de même de mon Horace. S'il peut amuser V. M. pendant quelques quarts d'heure,

Cum tot sustineas et tanta negotia solus,139-a

je crois qu'il ressemble un peu à l'ancien, qui avait aussi le bonheur d'amuser les premiers personnages de son temps. Ces messieurs, pourtant, malgré le bruit qu'ils font encore, et malgré le précieux vernis que leur donnent tant de siècles, n'en déplaise, <123>Sire, à votre modestie et à votre érudition, ne valurent pas assurément Federic. On doit être, Sire, à genoux devant V. M., autant par les bienfaits dont vous comblez vos peuples que par les exploits de votre bras victorieux, qui sait si bien les défendre de tant d'ennemis.

Qui sauve sa patrie est un dieu sur la terre.139-b

Je suis avec le plus profond respect, etc.


139-a Horace, Épîtres, liv. II, ép. 1, Ad Augustum, v. 1.

139-b Ce vers est de Frédéric, Épitre à Stille, t. X, p. 154.